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Estampes japonaises des Hautes-Alpes

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ADHA, Z La Mazelière, 1440/7

Coucher de soleil à travers le pont de Ryogoku depuis la rive de la Sumida à Onmayagashi. Hokusai (1760-1849). 1831-1833. De la série Trente-six vues du Mont Fuji. Epoque d’Edo (1603-1868). Xylogravure sur papier (nishiki-e), 37 x 25, format oban tateye. ADHA, Z La Mazelière, 1440/7

Cette estampe fait partie de la plus célèbre série d’estampes japonaises : les Trente-six vues du Mont Fuji d’Hokusai, à laquelle appartiennent également les estampes 1440/9 et 1440/21. Elle représente la Sumida, le fleuve traversant Tokyo, et le pont de Ryogoku, construit en 1659.

Au premier plan, une barque chargée de voyageurs et de colis s’éloigne d’une petite construction en bois, qui semble être une cabane de pêcheur. Les personnages sont tous détaillés, leurs gestes comme pris sur le vif, dans des attitudes très attachantes : deux d’entre eux retiennent leur chapeau – le vent fait tanguer l’embarcation – un autre plonge un linge dans la rivière, l’air pensif, tandis que tout à gauche, une lavandière effectue le même geste, mais d’un air fatigué et efficace à la fois… Et le passeur qui tient la barre, à quoi pense-t-il, le visage tourné vers le Mont Fuji ?

Cette scène témoigne des qualités d’Hokusai dans l’art de l’ukiyo-e : les « images du monde flottant » ont pour thème le quotidien du Japon, des Japonais. Les populations représentées sont humbles, attachantes : paysans, bateliers, charpentiers…

Au loin, les contours imprécis, apparaissent la ville de Tokyo frangée d’arbres, le pont et des dizaines de barques éparpillées sur le fleuve. Avec seulement deux couleurs, l’imprimeur et Hokusai ont su rendre la profondeur de l’espace et la lumière du soir. Le Mont Fuji se découpe nettement, d’un bleu intense, sur le ciel où l’obscurité s’installe déjà.

C’est ce bleu qui fait la spécificité de la série des Trente-six vues du Mont Fuji. Il est présent, avec plus ou moins d’importance, sur chacune des estampes. Ici, son utilisation est virtuose. Le dessin des vagues est fait à l’encre bleue, alors qu’il est habituellement fait à l’encre de Chine (voir estampe 1440/5) : cela lui donne du moelleux et une modernité saisissante.

Modernité, certes, puisque le bleu de Prusse, importé de Hollande depuis 1820, avait été utilisé pour la première fois en 1829, soit deux ou trois ans avant la création de cette estampe. Hokusai s’appropria immédiatement ce bleu d’origine synthétique, très apprécié parce qu’il pâlissait peu avec le temps. Le mouvement fut général, puisqu’on parle de « révolution bleue » pour l’art japonais des années 1830.

Mais au-delà de la couleur, l’estampe est entièrement aboutie. Ainsi, la composition, apparemment très simple – deux grandes horizontales et le Mont Fuji au centre – offre de nombreuses surprises : la courbe de la barque est la courbe du pont inversée ; l’arbre et la cabane de planches au premier plan donnent une stabilité à l’ensemble… La profondeur de champ est caractéristique de l’œuvre d’Hokusai, qui a assimilé les techniques de la perspective occidentales. Et cette longue perche verticale, que fait-elle là ? Finalement, c’est ce simple trait qui donne tout son piquant à la scène.

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